Captage de CO2 et géothermie
Qu’est-ce que le concept « CO2 Dissolved » ?
Il s’agit d’un procédé développé par le BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières), destiné à séquestrer le CO2 issu de l’activité industrielle dans un aquifère profond (ce sont des nappes d’eau saumâtre profondes, situées entre 1000 et 2000 m sous la surface du sol). La séquestration du CO2 est une composante essentielle de la lutte contre le réchauffement climatique. Au niveau mondial, les scénarios de limitation du réchauffement à 2°C, voire 1,5°C, ciblés par la COP21 (2015) nécessitent de soustraire de l’atmosphère environ 90 Gigatonnes de CO2 d’ici 2050 (source : JRC 2018). Le scénario 2°C de l’Agence Internationale de l’Energie implique le CCS (Carbon Capture & Storage) à hauteur de 12% parmi les solutions à mettre en œuvre (source : IEA 2016).
En France, les émissions actuelles sont de l’ordre de 346 Mt/an (source : DataLab 2020, valeur 2017). La Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC), qui constitue la feuille de route pour atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050, fixe un objectif de 15 Mt/an pour la séquestration du CO2 au milieu du siècle.
Le concept « CO2 Dissolved » s’inscrit dans cette stratégie. Le procédé consiste à utiliser l’eau rejetée par une installation géothermique pour dissoudre le CO2 et le réinjecter dans l’aquifère. En effet, une installation géothermique utilise généralement deux puits : un puits « producteur », qui fournit de l’eau chaude, et un puits « injecteur », dans lequel l’eau est réinjectée après avoir cédé sa chaleur. Le procédé CO2 Dissolved profite donc de ce puits pour accéder à l’aquifère et y stocker le CO2.
Quels sont les avantages du procédé ?
Le principal avantage est de s’adresser aux « petits » émetteurs de CO2 (émissions inférieures à 150 000 tonnes de CO2 par an). En effet la Stratégie Nationale Bas Carbone ne mise pour l’instant que sur les « gros » émetteurs, localisés près d’un site de stockage en réservoir (Lacq) ou d’un terminal de transport vers un stockage offshore (Dunkerque, Le Havre). Or les petits émetteurs représentent 32 Mt/an (source : C. Kervévan, BRGM, « The Conversation » 2019) ; parmi eux, ceux qui sont situés à l’aplomb d’un site à potentiel géothermique représentent environ 17 Mt/an, soit 22% des émissions industrielles (76 Mt/an en 2017, source DataLab 2020). Ce gisement peut donc contribuer pour une part significative à l’objectif de 15 Mt/an fixé par la SNBC.
En second lieu, le procédé se démarque de la technologie « classique » de stockage sous forme supercritique (stockage sous haute pression dans une cavité souterraine), par le fait que le CO2 est stocké sous forme dissoute. Le risque de « fuite » de CO2 est ainsi largement réduit.
Enfin, sur le plan économique, le procédé bénéficie de la synergie avec l’exploitation d’un gisement géothermique, ce qui permet de réduire significativement le coût de la séquestration.
Le projet « CO2 Dissolved Injection » et ses objectifs
Il s’agit d’un projet collaboratif impliquant 13 partenaires, piloté par le BRGM et soutenu financièrement par l’ANR et le Programme des Investissements d’Avenir, au travers du GIS « Geodenergies ». Ce projet consiste à réaliser des essais de validation de la technologie sur un puits géothermique existant. Une première phase d’étude, qui a duré environ 2 ans, a permis de définir le programme des essais, d’identifier un site propice, et de concevoir une installation d’essai et les moyens de mesure associés. La réalisation des essais est désormais conditionnée par l’obtention d’un budget et une autorisation administrative (en cours).
Quelle a été l’intervention de Naldeo sur ce projet ?
Naldeo Technologies & Industries a contribué à la définition du protocole des essais, à la définition et au chiffrage de l’installation d’essai en surface (stockage et conditionnement du CO2 préalablement à son injection), et a coordonné les travaux des partenaires concernant le design de la ligne d’injection du CO2 et de monitoring des essais. Naldeo Technologies & Industries a également réalisé le programme technique de la phase opérationnelle de la campagne d’essais.
Schéma de la ligne d’injection et de monitoring dans le puits géothermique
Schéma d’implantation de l’installation de surface
Un avis sur cette technologie ?
La technologie CO2 Dissolved semble très prometteuse, dans la mesure où elle répond à un objectif national à long terme, en s’adressant à des cibles industrielles qui sont jusqu’à maintenant dépourvues de solution technologique pour réduire leur empreinte carbone.
Il reste encore du chemin à parcourir pour réaliser une opération de démonstration à échelle industrielle, mais le potentiel de développement et de réplicabilité est bien présent.
Rédacteur : Dominique Goffe