Essor et potentiel des micro-réseaux en

Afrique du Sud

Partout dans le monde, l’intérêt pour les micro-réseaux est grandissant. Qu’il s’agisse de projets d’éco quartiers en Europe, produisant et consommant leur propre énergie, ou bien de projets d’électrification de villages entiers, isolés du réseau national, en Afrique ou en Asie. Ces projets se multiplient et ont vocation à faire se faire une place importante dans le paysage énergétique de demain. En effet, ils promeuvent un modèle économique durable et circulaire avec une production décarbonée, décentralisée et une consommation locale de l’énergie. Il ne s’agit pas seulement d’électricité mais bien d’énergie au sens large puisque ces projets se veulent multi-énergies : électricité, chaleur, hydrogène, biogaz etc.. Ils peuvent concerner à la fois le secteur résidentiel, commercial et industriel.

               Le contexte énergétique sud-africain 

L’Afrique du Sud se prête particulièrement bien au développement de projets de micro-réseaux. De par ses conditions météorologiques d’une part : le pays possède un incroyable potentiel de production renouvelable (solaire et éolien). Mais aussi et surtout, car celui-ci doit actuellement sécuriser son approvisionnement énergétique. En effet, Eskom, l’entreprise publique, qui produit 95% de l’électricité du pays et gère sa transmission et sa distribution, fait face au vieillissement de ses infrastructures. Eskom exploite principalement de vieilles centrales à charbon peu efficaces et dont la fiabilité décroît depuis plusieurs années. La conséquence est double : une électricité extrêmement carbonée et des coupures de courant de plus en plus fréquentes depuis 2008. Dernier épisode en date, début décembre 2019, avec la perte de 6 GW de production sur les 44 GW, entraînant des épisodes d’effacement qui nuisent à l’économie du pays. Déjà en 2007, l’Enterprise Surveys de la World Bank réalisée auprès de 937 entreprises sud-africaines mettait en avant l’obstacle que représente pour elles l’approvisionnement électricité : 44,9% d’entre elles expérimentaient des coupures de courant et 18,4% avaient décidé de s’équiper d’un groupe électrogène pour y faire face.

                Essor d’un marché au fort potentiel 

L’industrie sud-africaine est particulièrement touchée par ce manque de fiabilité du réseau national. S’il ne représente que 29% du PIB, l’industrie est de loin le secteur le plus énergivore puisqu’il représente 37% de l’énergie totale consommée dans le pays. Les industries extractives, métallurgiques et pétrochimiques, sont les plus gros consommateurs et concentrent sur quelques sites et mines une part très importante de la consommation du pays. Pour s’affranchir du réseau national et diminuer leur emprunte carbone, de plus en plus d’industriels signent des Corporate Power Purchase Agreements (CPPA) avec des producteurs d’électricité renouvelable. C’est le cas de Sibanye Stillwater, qui a signé un CPPA pour un parc solaire PV de 50 MWc afin d’approvisionner deux de ses mines dans le West Rand. Harmony, quant à lui, s’est fixé un objectif de 10% d’approvisionnement d’origine renouvelable pour ses mines d’ici 2022 et a déjà lancé 3 projets de CPPA. En parallèle, des projets plus innovants et multi-énergies commencent à se développer. C’est le cas du projet SKA, auquel participe Bertin Energie Environnement, et qui vise à assurer un approvisionnement en énergie fiable et le plus décarboné possible pour la partie sud-africaine du plus grand radiotélescope au monde (situé dans la province du Cap-Nord). Par ailleurs, du fait de ses importantes ressources en métaux et terres rares (notamment le platine et le vanadium), le pays mise sur le développement des filières technologiques de l’hydrogène et des batteries Redox flow au vanadium. Ces deux technologies présentent des caractéristiques complémentaires de la technologie des batteries lithium-ions pour le stockage d’énergie, et permettraient donc d’accroître la part de renouvelable dans le mix énergétique sud-africain.

                Le retard pris par l’Afrique du Sud en terme de mix énergétique pourrait ainsi être rapidement rattrapé. Le pays pourrait même devenir dans la décennie à venir l’un des marchés les plus important et dynamique pour les micro-réseaux multi-énergies.