Qu’est-ce que le SWAC, ou Sea Water Air Conditioning ?

Mais quel est ce système, souvent proposé sur les îles comme alternative aux systèmes de climatisation classiques ?

Le SWAC est un système permettant d’utiliser l’eau de mer comme source froide (en « free-cooling ») pour répondre aux besoins de climatisation de quelques bâtiments jusqu’à un quartier entier. Il est souvent proposé dans les zones « bad-grid » avec un coût de l’électricité important et carboné. 

Cet article, réalisé avec les informations récoltées au cours d’une mission chez Bertin Energie Environnement, cherche à donner une image actualisée :

De la technologie SWAC et ses variantes

Des enjeux d’intégration de cette technologie

Des projets en cours dans le monde

Le principe du SWAC

Les deux procédés, différents dans leur architecture, n’utilisent pas l’électricité de la même manière.

  • Les groupes froids classiques ont une consommation électrique principalement liée au fonctionnement du/des compresseur(s)
  • Le SWAC a une consommation électrique beaucoup plus faible, liée principalement aux pompes d’eau de mer

Trois étapes sont nécessaires dans ce procédé :

1 – Pomper l’eau de mer « froide »

2 – Faire échanger cette eau de mer avec le réseau de froid

3 – Décharger l’eau de mer « réchauffée »

Plus la température de l’eau de mer est basse, meilleur sera l’échange thermique. Il n’est donc pas rare d’aller pomper l’eau de mer à plusieurs kilomètres des côtes, à une profondeur où la température est basse (~5°C) et constante. Ci-dessous une illustration d’un système de deep SWAC.

Ce système, relativement simple sur le papier repose sur trois éléments principaux :

  • Les pipes et le système de pompage : Permettant le pompage de l’eau de mer à basse température en profondeur
  • L’échangeur : Permettant le transfert d’énergie entre l’eau de mer froide et le réseau de froid à refroidir

Ci-dessous quelques exemples de projets de deep SWAC (statut en parenthèse) :

  • Bora bora (En panne) / Photo ci-dessous
  • Tetiaroa, Tahiti (Operationnel)
  • Papeete, Tahiti (Appel d’offres)
  • Saint-Pierre, La Réunion (Appel d’offres)

http://www.clubdesargonautes.org/energie/borabora.php

    Des variantes, avec machines thermodynamiques, permettant d’étendre le domaine de fonctionnement

    Ce principe de free-cooling est également appliqué sur de l’eau douce (Lake Water Air Conditioning), mais également avec des machines thermodynamiques. Ces machines, réversible ou non, permettent d’utiliser l’eau de mer ou l’eau douce comme source froide ou chaude. 

    Variante 1 : Climatisation par chiller avec évacuation de la chaleur dans l’eau

    Cette variante, utilisée pour les réseaux de froid, permet de profiter d’une source froide à plus basse température que l’air extérieur et plus constante que celle de l’air extérieur. Ceci permettant d’éviter de rejeter les calories dans un air plus chaud (généralement), et donc de d’augmenter l’Energy Efficiency Ration des chiller.

      Quelques villes avec des systèmes opérationnels et leur puissance froid :

      • Lake Cornell (USA) – 70 MW
      • Toronto (Canada) – 183 MW
      • Södertälje (Suède) – 60 MW
      • Paris (France) – 62 MW

       

      Variante 2 : Chauffage par pompe à chaleur (PAC) avec récupération de chaleur dans l’eau

      Cette variante, utilisé pour les réseaux de chaleur nordique, permet de profiter d’une source chaude à plus haute température et plus constante que l’air extérieur. Ceci permettant d’éviter de rejeter les frigories dans un air plus froid (généralement), et donc de d’augmenter le Coefficient de Performance des PAC.

        Quelques villes avec des systèmes opérationnels et leur puissance chaud :

            • Bodø (Norway) – 2 MW
            • Drammen (Norway) – 15 MW 

        Variante 3 :  la thalassothermie

        Cette solution combine les fonctions des deux variantes précédentes, en fonction du besoin. Ceci permettant de chauffer et climatiser plus efficacement, comme expliqué précédemment, mais avec un système réversible (Ou avec chiller et PAC en parallèle).

        Quelques villes avec des systèmes opérationnels et leur puissance froid :

        • Geneva (Swiss) – 250 MW
        • Helsinki (Finland) – 60 MW
        • Thassalia, Marseille (France) – 20 MW
        • Massileo, Marseille (France) – 21 MW

         

         

        SWAC vs Système de climatisation standard : un match gagné d’avance ?

        Sur le papier, le deep SWAC l’emporte très largement sur les systèmes de climatisation standards. Ceci étant principalement dû au fait que ce système consomme, à production de froid équivalent, beaucoup moins d’électricité que les systèmes standards (cf tableau ci-dessous).

        Les deux procédés, différents dans leur architecture, n’utilisent pas l’électricité de la même manière.

        • Les groupes froids classiques ont une consommation électrique principalement liée au fonctionnement du/des compresseur(s)
        • Le SWAC a une consommation électrique beaucoup plus faible, liée principalement aux pompes d’eau de mer

        Sur le terrain, la réalisation d’un système deep-SWAC ne peut être rentable qu’avec certaines conditions décrites ci-dessous :

        • Température de l’eau de mer basse et constante: Pour refroidir un réseau froid pour de la climatisation (exemple régime 7/12°C) il est nécessaire d’avoir une température d’eau de mer en entrée du système < à 7°C. Pour trouver une température aussi basse naturellement, il faut se situer sur des îles volcaniques et il est nécessaire de descendre à des profondeurs > 500m.
        • Besoin de froid relativement constant: L’amortissement du cout de l’installation se fait sur une période relativement longue, il est donc primordial d’avoir un besoin en froid constant de façon à maximiser l’utilisation du système et diminuer le Temps de Retour sur Investissement. 
        • Impact environnemental réduit: Chaque projet doit faire l’objet d’une étude d’impact environnemental. La mise en place du système (particulièrement des pipes) peut avoir un impact non-négligeable sur la faune et la flore. Celui-ci doit être connu, maitrisé, et limité au maximum.
        • Mauvais réseau électrique: Qui dit mauvais réseaux électrique dit coût important de l’électricité et électricité carbonée. C’est dans cette configuration que le SWAC a tout son intérêt, car il sera beaucoup plus vite rentabilisé et permettra d’économiser la production de l’électricité fortement carbonée !

        Une fois toutes conditions ci-dessus réunies, les projets doivent obtenir un soutien politique fort ainsi qu’une acceptation sociale importante. Les retours d’expériences montrent que sans ces soutiens locaux les projets n’avancent pas et finissent par être arrêtés.

         

        Mapping des projets  

        Ci-dessous un mapping des projets de deep-SWAC dans le monde, avec un positionnement en fonction de leur puissance froid, leur CAPEX, et leur statut.

        Notons ici que les plus gros projets ont été abandonnés, et que seulement deux projets sont sortis de terre (et de mer !). Le SWAC de Bora-Bora est actuellement (début 2019) en cours de réparation, après une défaillance des pipes en 2016.

        Commentaire du rédacteur :

        Cet article a été rédigé dans le but de partager les connaissances acquises sur ce sujet peu connu du grand public.

        Le SWAC et ses variantes ne sont pas des solutions miracles au réchauffement climatique, mais ils permettent des économies d’énergies nettes par rapport aux solutions de chauffage et climatisation classiques.

        Le développement de ces systèmes n’enlève pas la nécessité d’identifier, maitriser notre consommation énergétique, pour consommer intelligemment et durablement.